Réveil ensoleillé, dehors il glace, ça brille.Etrangeté d’être ici, loin de ma vie française et étrangère à la vie américaine. Sans intention d'insertion, 3 mois c'est court.Hélène Wurlitzer a donné sa maison et sa fortune pour que des artistes puissent vivre un temps libre de tout.Absolument libre de dormir, de travailler, de lire, de me balader, de prendre ou non des photos. Une liberté qui prend vraiment forme comme une crème ou une sauce prend, dans un lieu et un temps consacré à cela.Et la présence de 7 autres personnes, qui partagent le même immense privilège, renforce encore la prise. Chacun dans sa petite maison, toutes différentes, avec des espaces communs où on peut faire connaissance. Arrivée jeudi dernier, ai rencontré une peintre et deux écrivaines. N’ai vraiment parlé qu’avec Carolyn. J’aime assez cette prudence et suis entre autres très curieuse de voir comment les relations vont s’établir. Réunion générale jeudi prochain autour d’un café !
Je perçois déjà comme il sera peut-être déstabilisant d’avoir l'autorisation officielle d’aucune obligation.Cela débouche sur des questions du genre : que suis-je venue faire ici, que vais-je tirer de neuf de ce morceau de vie. Cette "vacance" va-t-elle permettre d'aller dans des directions dont je parle souvent sans y aller justement…Je pressens la peur qui pourrait venir à l'idée que rien ne sorte de tout ce temps dont nous disposons entièrement. En arrière plan, l'éventualité de repartir sans que rien n'ait eu lieu. Probablement pour ça que j'écris tous les soirs quelques lignes et me re-passe les photos prises.
Il sera aussi particulièrement précieux ici, à l'opposé de cette inquiétude latente du faire, de laisser le temps au temps. La banalité des jours passés qui me saute aux yeux quand je re-lis et re-garde ce que j'ai fait, ne me déplait pas.Grâce à la neige? Elle gomme les reliefs, les traits saillants, les couleurs, toute excentricité. Elle ramène au plus simple déroulement des jours, transforme le monde balisé en territoire inconnu : blanc étincelant au soleil ou étouffé par un ciel plus gris, et silencieux.
Jusqu'à la nuit cotonneuse.
WÜrlitzer Foundation
2- Conduire sous la Neige, Accueil à la Wurlitzer Foundation à Taos
Au matin soleil vite effacé par le ciel si blanc en haut et gris sombre à l’horizon.Je me dis prendre la route en vitesse pour Taos.
La neige commence à tomber.Tout le monde roule tranquille et moi avec ma voiture automatique je me demande comment on fait frein moteur là-dessus.Finalement ça ne glisse pas.Paysage inreconnaissable. En mai 2006 tout était rouge bleu ocre, limpide. Aujourd’hui brun poudré de neige et de brume. Maquillé. Blanc éteint.Après Espanola, peu avant Taos, le Rio Grande, splendide à travers les grands arbres qui le bordent.
Accueil chaleureux.La "casita" 9s, s pour sud, sera la mienne pendant 3 mois.
Pour résister au sommeil (à 6pm ici il est 2h du mat en moi) je pars faire des courses, oublie la moitié des trucs.Dîne et m’endors trop tôt.A 4h je me réveille et écoute des nouvelles en boucle :Haïti, un reportage d’horreur où j’entends les Haïtiens dirent leur abandon et la mort si personne ne vient les aider en un Français étouffé par la traduction simultanée.Démocratie américaine : les entreprises considérées comme des personnes peuvent maintenant financer les campagnes des candidats qu’ils soutiennent et peser ainsi directement sur les pouvoirs politiques.Les prévisions météo, sans importance, mais qui me concernent: il va neiger très fort au Nouveau Mexique.Depuis l'arrivée, blanc dès que le paysage s'éloigne. Où sont les montagnes?